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Jean-Marie Straub, Danièle Huillet

JMS : Ce “salaud” disait ça parce qu’il n’aurait jamais mis les pieds à la chasse…

 

Il pensait au néolithique, la cueillette, la chasse, la poterie…

 

JMS : Au-delà des Assyriens encore !

DH : La grandeur du cinéma c’est que c’est un travail collectif, c’est ce qu’il a en commun avec le théâtre sauf que le théâtre c’est une caste, on ne va pas chercher les gens dans la rue, c’est encore pire que pour un film ! Mais ce caractère collectif c’est ce qui est passionnant. Et le rapport à la politique il est là.

JMS : Mais l’envie de la chose n’arrive pas comme ça un beau matin, on ne se dit pas : « Tiens on va revenir à la culture orale », c’est comme pour tous les gens qui travaillent dans un domaine comme ça, ça vient, pourquoi pas, de Farrebique, du Journal d’un curé de campagne ou du Fleuve ou même, pourquoi pas, du Capitaine Fracasse de Gance, parce que là on se dit tout à coup qu’il y a quelque chose…, ou de deux-trois phrases de Michel Simon dans Boudu : « Qu’est-ce que ça peut te foutre à toi vieux schnock ! »

 

Comment avez-vous évolué sur cette question de l’acteur professionnel et du non-professionnel depuis vos premiers films ?

 

JMS : Dans Nicht Versöhnt on en avait réellement un qui n’était pas capable d’écrire son nom et deux-trois autres qui ne pouvaient pas lire le journal. Dans le Kafka, ce n’est pas tout à fait comme ça mais il y en a tout de même un, le portier, avec sa lanterne. Mais là il y a un mélange puisqu’à l’autre bout de l’éventail il y a Mario Adorf, Alfred Edel, Laura Betti ou Libgart Schwarz.

Il y a des films où il y a un mélange et d’autres pas, mais ça n’est pas voulu en tant que tel, ça dépend des personnages. Il est évident que pour faire l’oncle dans le Kafka, on avait intérêt à prendre un acteur et pas un plouc, cela n’aurait pas fonctionné. L’acteur, c’est l’ersatz du bourgeois en un sens, mais le bourgeois en ce cas-là, n’aurait pas été juste non plus. Et dans Nicht Versöhnt, la mère finalement, c’est pas une actrice, c’est une vieille femme, vraiment pas une intellectuelle, qu’on avait rencontrée dans notre ascenseur ; Ferdi nous l’avons vu dans la rue à Cologne : il balançait sa bicyclette sur un camion où son père chargeait des tonneaux de bière de Dortmund.