Sur Lothringen !, cela nous est arrivé, quand on a demandé à avoir le zoom “Primo”, on nous a dit que c’était beaucoup trop cher pour un court-métrage. Or nous on sait ce qu’on veut tourner, où, et ce dont a besoin techniquement, et si vous ne voulez pas nous payer ça, eh bien ! on le paiera nous-mêmes.
DH : Le sens du mot politique c’est aussi celui de liberté. Si je tiens à ce qu’il y ait cette phrase sur le festival de Cannes, ce n’est pas par vengeance, ni pour secouer quoi que ce soit car ça ne secouera rien du tout, mais parce qu’il faut que quelques jeunes-gens sachent…
JMS : …qu’il n’y a pas de liberté artistique en système capitaliste ! et que même ces organismes soi-disant au service de la culture ne sont qu’au service de l’industrie culturelle du cinéma français et quand ils voient arriver un film où il n’y a pas la dernière belle fille à la mode ou Depardieu ou dieu sait qui, ils n’en veulent pas.
DH : Quand on a fait les affiches pour Nicht Versöhnt et qu’on les a apportées à la responsable du cinéma où le film sortait, elle nous a dit : « Ach ! das ist nicht unser Geschmack » [c’est pas notre goût]. On a dit : « Très bien on les paiera nous-mêmes » et, à l’époque, nous n’avions pas un sou et il a fallu trouver mille marks. Tu me diras que c’est un grand privilège parce que le prolo, lui, ne peut pas faire ça, mais curieusement, quand on entend les dockers de Saint-Nazaire, au moment des grandes grèves, ce dont ils parlent le plus, ce n’est pas d’histoires d’argent et des différences qu’il peut y avoir entre eux, ce dont ils parlent le plus c’est de la liberté, de pouvoir ne pas aller travailler si on le veut, pouvoir changer d’endroit, « simplement pouvoir changer de quai quand ça nous plaît ! » C’est cela le statut de docker qu’il défendent. C’est tout de même extraordinaire que ce soit ceux-là qui parlent de liberté…
JMS : La preuve : Toscan du Plantier ! Je me limite à deux collègues à nous, estimables comme on dit, l’un qui s’appelle Syberberg et l’autre Benoît Jacquot. Voilà deux garçons — pas des petits vieux, ils devraient donc être encore capables de résister —, qui se sont tous deux fait avoir, en l’espace de vingt ans, par le même système qui s’appelle Toscan du Plantier. Syberberg voulait enregistrer l’opéra de Wagner en son direct, en même temps que l’image, et il y a renoncé parce que Toscan lui a fourgué un enregistrement à Monte-Carlo qu’il avait dans sa phonothèque et que ça coûtait moins cher. Il a donc fait un film qui n’a aucun rapport avec ce qu’il voulait faire ! Voilà une manière de faire qui n’a rien de politique.
La même chose vient d’arriver à Benoît Jacquot qui tourne La Traviata je crois, qui a travaillé quelques semaines ou mois avec un ingénieur du son parce qu’il avait juré que ce serait en son direct et tout d’un coup il fait son film en play-back.